Le grand historien américain Marc Trachtenberg publie une collection des articles les plus significatifs de sa carrière en un seul ouvrage.
Disons-le d’emblée, ce livre est une réussite. En effet, outre la qualité du travail de recherche en histoire des relations internationales qui est proposée, Trachtenberg invite surtout à une réflexion sur la nature du système international et la manière de l’étudier.
Les deux premiers chapitres sont donc des réflexions théoriques (ancrées dans la philosophie des sciences) sur les relations internationales et la possibilité d’une science sociale de l’international. Bien qu’historien, Trachtenberg reconnaît la nécessité d’une (ou plusieurs) théorie(s) des relations internationales, qui permettent d’enrichir le travail de recherche historique en lui donnant un sens. Il est suffisamment rare que des historiens, surtout de renom, admettent la nécessité des politistes (et leur dette envers eux) pour que ce point soit remarqué. L’auteur est ainsi très familier des théories en vogue dans la discipline (en particulier le réalisme) et en offre des interprétations originales, tout particulièrement en amendant la tendance de certaines approches à l’insensibilité au contexte historique. Ces deux premiers chapitres devraient être une lecture obligatoire pour tout étudiant des relations internationales, puisqu’ils forcent à réfléchir à la nature du système et la manière de l’étudier (donc l’ontologie et l’épistémologie de la discipline) de manière subtile et originale.
Le reste de l’ouvrage se compose d’essais sur certains moments phares des relations internationales depuis 1945, qui illustrent l’approche particulière de Trachtenberg.
Une vraie réussite, qui montre la possibilité d’un dialogue fructueux entre disciplines: voilà un auteur qui ne se contente pas de prêcher la multidisciplinarité, mais la pratique avec élégance.
Olivier Schmitt