Combined Arms Warfare in the Twentieth Century

Dans cet ouvrage paru en 2001, Jonathan M. House étudie l’évolution du combat interarmes au XX° siècle. L’auteur est déjà bien connu des amateurs d’histoire militaire, puisque avec son collège David Glantz il a renouvelé l’historiographie du front de l’Est durant la seconde Guerre Mondiale (en particulier avec les ouvrages When Titans Clashed et The Battle of Kursk) et a récemment publié une excellente histoire militaire des débuts de la Guerre Froide.


L’ouvrage est en fait une mise à jour expurgée de tout jargon d’une étude réalisée par l’auteur lorsqu’il enseignait au Command and General Staff College de l’U.S Army, et le souci pédagogique est évident. Si le combat interarmes a toujours été pratiqué (l’utilisation intelligente de la combinaison de l’infanterie, de la cavalerie, du génie et plus tard de l’artillerie faisant d’ailleurs la marque des grands chefs), l’auteur avance que les développements technologiques de la fin du XIX° siècle et du XX° siècle ont rendu sa conduite bien plus difficile: la tâche du chef militaire chargé d’organiser la combinaison d’armes différentes sur un champ de bataille immense et en trois dimensions étant inédite dans l’histoire. Il cherche ainsi à expliquer comment les principales armées (Etats-Unis, Grande-Bretagne, France, Allemagne, Russie et Israël) ont pris en compte les changements introduits par les fusils à tir rapide, les mitrailleuses, les chars, les avions, et l’évolution fulgurante des systèmes de communication et des capteurs. L’ouvrage couvre les grands conflits du XX° siècle, commençant par la première Guerre Mondiale et s’achevant sur la guerre du Golfe et la Tchétchénie.

L’auteur tend à expliquer les performances militaires et l’efficacité du combat interarmes en fonction de l’organisation adoptée (centralisation ou non du commandement, dispersion des unités, etc.) et de la manière dont les pions tactiques sont organisés pour pallier à leurs faiblesses respectives. Il étudie en détails la manière dont la culture militaire, l’expérience du combat et l’évaluation des menaces ont conduit à organiser les régiments, brigades et divisions autour de ce qu’il considère être la principale arme des combats majeurs du XX° siècle: le char d’assaut. Si l’ouvrage fait la part belle à la seconde Guerre Mondiale en tant qu’expérience fondatrice du combat interarmes moderne, les chapitres sur la manière dont les Soviétiques et les Américains tentèrent de s’adapter au « champ de bataille nucléaire » de la Guerre Froide sont également particulièrement intéressants.

Si l’approche du combat interarmes par le biais de la structure organisationnelle peut sembler parfois déterministe, l’ouvrage est néanmoins particulièrement convaincant, notamment grâce à un appareil critique développé comprenant de nombreuses sources primaires. En tous cas, l’auteur a une thèse: le combat interarmes doit être mené au plus petit niveau tactique possible (comme le sont les GTIAs en Afghanistan par exemple). Néanmoins, il n’est pas forcément nécessaire de créer des structures interarmes permanentes et l’organisation régimentaire en fonction de spécialités peut être maintenue: l’important pour le chef militaire est de pouvoir s’appuyer sur ces organisations permanentes pour pouvoir créer des structures interarmes correspondant au besoin militaire (certains GTIAs ayant une dominante infanterie, ou artillerie, etc. en fonction de la situation sur le théâtre). House discute également l’appui de l’aviation aux opérations et, tout en prenant en compte les objections des aviateurs à une intégration interarmes, avance qu’il n’est pas souhaitable de mener une campagne aérienne déconnectée d’une campagne terrestre. Sa critique semble aller trop loin sur ce point, et est en tous cas marquée par le contexte du début du XXI° siècle, lorsque les discussions sur le rôle stratégique de l’airpower (suite à la Guerre du Golfe et à la campagne du Kosovo) envahissaient le débat stratégique. Si l’on comprend que House se soit élevé contre ce discours en 2001, sa critique semble trop forte douze ans plus tard.

Autre petit point de déception: si l’on apprécie la présence de nombreuses cartes, celles-ci ne sont pas souvent très claires et empêchent de réellement se rendre compte de l’évolution d’une bataille, nécessitant ainsi une culture en histoire militaire qui risque de rebuter (un peu) le lectorat. Au final, House a écrit un excellent livre sur le combat interarmes, que l’on peut sans hésiter recommander aux amateurs d’histoire militaire, mais également aux officiers stagiaires de l’Ecole de Guerre par exemple. Et si la tendance est de plus en plus au combat interarmées (allant ainsi au-delà de l’interarmes), cet ouvrage est néanmoins un outil de référence sur les difficultés et les opportunités de combiner différents outils pour obtenir la décision militaire.

Olivier Schmitt

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